mardi 1er mars 2005 ,par creature

Les chefs d’entreprises français accorderaient-ils plus d’importance à l’apparence de leurs candidats que leurs homologues européens ? C’est en tous cas ce qu’affirme une enquête du Centre d’Etudes de l’Emploi après avoir analysé un corpus de 1200 offres d’emplois britanniques, espagnoles et françaises diffusées sur le net.

En France, la sélection des candidats apparaît davantage basée sur l’âge, le diplôme et l’apparence physique. Un élitisme français qui a pour conséquence l’exclusion volontaire d’une grande partie des demandeurs d’emplois sur la base de critères discutables. Plus de 90% des annonces concernées ciblent les 25-40 ayant au moins deux à trois années d’expérience professionnelle derrière eux : une exigence qui écarte d’office les plus de 40 ans et les débutants ! En Espagne, ce critère de sélection est deux fois moins présent et il est quasiment inexistant en Angleterre.

La mention systématique de la formation exigée (7 fois sur 10 dans les annonces françaises) se traduit aussi souvent par une surenchère des diplômes requis, décourageant d’entrée de jeu de nombreux candidats qui auraient les compétences nécessaires mais sans posséder le niveau d’études affiché. Une telle focalisation sur les études n’existe ni en Espagne ni en Grande-Bretagne. L’expression « bac + x » est d’ailleurs devenue un standard des annonceurs français, alors qu’elle n’a pas d’équivalent dans les autres pays.

L’étude insiste par ailleurs sur le cumul de tous ces critères en amont du recrutement. Avant d’obtenir un entretien, un candidat français doit nécessairement passer par l’envoi d’un dossier contenant CV, photographie et lettre de motivation. Et devant la pile de demandes, l’employeur a tendance à se focaliser sur le « haut du CV » (nom, sexe, âge, photo), accentuant ainsi la discrimination à l’embauche. La photographie est d’ailleurs prohibée par les annonceurs britanniques pour éviter les pratiques discriminatoires.

Quand on sait qu’en 1996, 40% des demandeurs d’emploi n’ont obtenu aucun entretien d’embauche au cours de leur période d’inactivité, une sélection aussi stricte ne peut qu’alimenter le chômage de longue durée. Au moment où le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin tient une réunion nationale sur la lutte contre les discriminations dans l’entreprise et l’égalité des chances, il serait bon de s’interroger sur les dérives du recrutement à la française...